Portes ouvertes 2022 au
Domaine Deiss à Bergheim
Après une longue période de trouble et d’incertitude, les vignerons alsaciens reprennent leurs bonnes habitudes en profitant des beaux jours pour ouvrir leur domaine à leurs clients pour leur expliquer leur façon de concevoir leurs vins et leur présenter les cuvées proposées actuellement à la vente.
Fidèle à une tradition solidement établie, le domaine Deiss a choisi le long week-end de l’Ascension pour organiser cet évènement vinique…et comme j’ai pu me rendre compte (en consultant mes archives) que cela faisait 5 ans que je n’avais plus participé à cette journée, il fallait vraiment que je réagisse !
Hoppla, c’est parti !
Pour cette année, l’équipe du domaine Deiss à choisi d’installer ses ateliers de dégustation en plein-air et ça tombe plutôt bien puisqu’il fait très beau sur Bergheim en cette fin de mois de mai.
L’accueil au domaine Deiss avec la remise d’un verre et d’un carnet de dégustation.
Le parcours dans les jardins du domaine Deiss nous propose 4 étapes matérialisées par 4 tables thématiques :
- la table des vins rouges et des terroirs cristallins
- la table des terroirs calcaires et des terroirs argileux
- la table des grands crus
- la table des vins de temps
La table des terroirs cristallins
La première étape à la table des vins rouges et des vins issus de terroirs cristallins
- Alsace Berckhem 2018 : nez complexe avec de belles notes exotiques et pierreuses, bouche généreuse avec un jus très suave et une finale bien digeste. (terroir : calcaire dominant)
- Alsace Langenberg 2019 : nez floral et délicatement poivré, bouche droite et sapide, finale fraîche et légèrement tannique. (terroir : granit)
- Alsace Engelgarten 2018 : nez complexe et évolutif avec une palette fruitée et minérale, bouche longiligne, très élégante avec une salinité sensible et une finale longue et salivante. (terroir : graves)
Ces trois bouteilles nous proposent une jolie mise en condition avec des vins déjà bien en place qui se livrent à la dégustation avec une spontanéité gourmande tout à fait réjouissante : à côté d’une cuvée Berkhem très séduisante et d’une cuvée Langenberg marquée par une belle empreinte minérale, la cuvée Engelgarten nous propose une petite synthèse très harmonieuse des deux…et déjà un premier coup de cœur pour moi !
Comme je n’ai que deux heures devant moi, je vais continuer mon cheminement vers les autres vins blancs et revenir vers les rouges s’il me reste un peu de temps en fin de parcours…
La table des terroirs calcaires et argileux
- Alsace Schoffweg 2017 : nez agréable avec un fruité discret sur un fond légèrement empyreumatique, bouche large et puissante, finale longue et bien salivante. (terroir : calcaire)
- Alsace Rotenberg 2017 : nez assez discret avec de belles notes d’agrumes mûrs, bouche riche mais solidement charpentée, finale très sapide. (terroir : calcaire)
- Alsace Grasberg 2016 : nez très complexe avec de belles nuances exotiques sur un fond d’herbes à tisane, bouche très généreuse mais parfaitement digeste, finale fraîche et délicatement acidulée. (terroir : calcaire)
- Alsace Gruenspiel 2016 : nez très élégant avec une belle palette florale et mentholée, bouche svelte et « classieuse », finale digeste avec un petit grip tannique stimulant. (terroir : argiles et dépôts gréseux et granitiques)
- Alsace Burg 2016 : nez riche avec une belle palette citronnée et pierreuse, bouche opulente avec un jus onctueux et un équilibre demi-sec, finale délicatement acidulée avec une belle persistance sur la pêche de vigne et la terre humide. (terroir: marnes).
- Alsace Huebuhl 2017 : nez mûr et complexe avec des notes d’épices douces sur un fond grillé/torréfié, bouche opulente avec un équilibre moelleux parfaitement assumé, finale sapide. (terroir : argiles)
Ces crus qui jouent les équilibristes pour construire de belles harmonies entre des jus très généreux et des trames acides/salines solidement tressées auront besoin d’encore un peu de temps pour digérer leur opulence et laisser apparaître de façon plus lisible la signature de leurs terroirs…le seul problème, c’est que ces vins se goûtent déjà remarquablement bien dès aujourd’hui et qu’il va falloir renoncer au plaisir immédiat pour les oublier durant quelques années en cave.
La table des Grands Crus
Les Grands crus, c’est dans le jardin
- Alsace Grand Cru Schlossberg 2019 : nez très complexe mais encore un peu sur la retenue, bouche rectiligne guidée par une acidité droite et filante, finale très sapide avec de beaux amers minéraux. (terroir : granit)
- Alsace Grand Cru Mambourg 2018 : nez ouvert et riche, notes de citron mûr sur un fond beurré/vanillé très agréable, bouche ample et sphérique basée sur une acidité bien large, finale longue et tonique. (terroir : calcaire)
Dernier arrivé dans la cave de la famille Deiss, le Schlossberg apporte une touche vive et cristalline qui manquait au trio emblématique de Grands Crus du domaine, alors que le Mambourg affirme de plus en plus clairement sa parenté avec les grands terroirs de la Côte de Beaune…voilà deux vins qui revendiquent leur identité dès leur prime jeunesse !
Le sol de sable granitique du Schlossberg et le sol du Mambourg très proche de ceux des crus de la Côte de Beaune.
- Alsace Grand Cru Altenberg de Bergheim 2016 : nez complexe sur les agrumes et le coing frais, bouche généreuse avec une texture bien crémeuse et une salinité très intense, finale sapide marquée par une belle persistance minérale. (terroir : argilo-calcaro-gréseux)
- Grand Cru Schoenenbourg 2016 : nez raffiné avec une palette aromatique épicée et minérale, bouche très élégante avec une belle vinosité et un équilibre très digeste, finale fraîche avec de beaux amers minéraux et un long sillage finement iodé. (terroir : marnes à gypse)
Après 5 années de garde, les deux derniers Grands Crus de la gamme du domaine Deiss, commencent à exprimer pleinement leur identité liée à leur terroir avec un Altenberg qui a construit un équilibre idéal entre suavité et minéralité et un Schoenenbourg d’une classe absolue…des vins de très haute tenue promis à un avenir radieux.
Le sol très complexe de l’Altenberg et le sol gypseux du Schoenenbourg
Pour conclure :
Même si ma visite de cette année a été un peu plus courte que d’habitude – ce qui ne m’a pas permis de profiter de toutes les animations prévues pour cette journée Portes Ouvertes – j’ai été ravi de pouvoir faire cette dégustation presque complète de la production actuelle de ce grand domaine alsacien.
Le jardin du domaine est aménagé pour permettre de faire des pauses entre deux dégustations.
Jean-Michel et Mathieu Deiss font partie de ces vignerons alsaciens qui ont pris le parti de pousser les maturités de leurs raisins à leur terme et qui ont appris à gérer la richesse des jus pour produire des vins opulents mais profondément marqués par la minéralité de leurs terroirs d’origine.
Dès leur prime jeunesse, ces vins racés et digestes révèlent des caractères gastronomiques évidents, prouvant par là même à quel point c’est réducteur – voire même aberrant – de se focaliser uniquement sur la sucrosité d’un vin pour qualifier son équilibre.
On en oublierait presque que ces bouteilles sont avant tout conçues pour être gardées quelques années en cave afin de leur permettre de donner toute la mesure de leur potentiel…comme ce Langenberg 2009 remarquable de complexité et de droiture bu avec des amis lors de mon périple sudiste où cet Altenberg de Bergheim 2011 qui a enchanté nos papilles lors d’un récent repas entre bons vivants.
Merci à l’équipe du domaine Deiss d’avoir partagé ces belles émotions viniques.
Un petit « mémo » pour s’initier à la dégustation géo-sensorielle
Article de Pierre Radmacher, vous pouvez le suivre sur son site Vins, Vignobles et Vignerons
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