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Il y a un an, nous avons rencontré Baptiste Kirchhoffer, un artisan passionné qui réinvente l’univers des spiritueux dans le quartier historique des maraîchers de Colmar. Là où l’empreinte agricole reste omniprésente, Baptiste a donné vie à une initiative audacieuse en réhabilitant un ancien local familial. Sa micro-distillerie, L’Officine, attire l’attention par son nom intrigant et un parcours professionnel marqué par la créativité et le savoir-faire. Cet article vous propose de plonger dans son histoire, une aventure pleine d’audace, d’innovation, et de défis.

Du laboratoire dentaire à la distillation artisanale

Avant de se consacrer au gin, Baptiste avait une carrière bien éloignée du monde des spiritueux : il exerçait en tant que prothésiste dentaire. « C’était déjà de l’artisanat, mais dans un autre univers », explique-t-il, esquissant un sourire. En 2018, animé par son amour pour le travail manuel et minutieux, il décide de se réinventer. Le déclic survient lors d’un voyage initiatique en Nouvelle-Zélande. Cette année d’exploration marque un tournant décisif, le plongeant dans la culture anglo-saxonne du gin.

« Je n’en avais goûté qu’une ou deux fois avant ça », avoue-t-il en riant. Durant ce road trip en terres néo-zélandaises, il découvre une diversité aromatique fascinante. Des mixologues passionnés lui enseignent les subtilités de cet alcool raffiné, et une idée germe : créer une micro-distillerie en Alsace, sa région natale. « L’idée de façonner un produit unique avec des plantes m’a séduit », confie Baptiste.

L’Officine : un clin d’œil à l’ancien et au nouveau

Le choix du nom, L’Officine, n’est pas anodin. Il évoque les plantes, le soin, et un univers proche de la pharmacie. Une référence subtile à son ancien métier, mais aussi à son rêve initial d’ouvrir un laboratoire dentaire dans ce même espace. Désormais, ce sont des distillats de plantes qu’il y prépare, avec un clin d’œil appuyé dans le design des bouteilles, certaines en forme d’Erlenmeyer ou de ballons de chimie. « L’idée, c’est de soigner, non avec des médicaments, mais avec de l’alcool et des plantes », plaisante-t-il. « Pas encore remboursé par la Sécurité sociale, mais qui sait, un jour ! »

Des débuts semés d’embûches administratives

Les premières années n’ont pas été de tout repos. Les contraintes administratives se sont révélées un véritable casse-tête, admet-il. « Obtenir les autorisations pour produire et vendre de l’alcool, c’est un parcours du combattant. » Il lui a fallu six mois pour décrocher les statuts d’entrepositaire et aligner les multiples formalités nécessaires. Ces étapes l’ont fait douter, mais jamais abandonner.

En parallèle, il a entrepris de rénover le local familial, un ancien atelier de maraîchers. Nettoyage, électricité, plomberie, peinture : la transformation a demandé une énergie colossale. « Ce lieu, c’est un peu mon héritage, et le voir renaître me donne une immense satisfaction », partage-t-il.

Un quotidien de couteau suisse

Aujourd’hui, Baptiste gère son entreprise en véritable touche-à-tout. « Je travaille du lundi au dimanche », déclare-t-il sans détour. Production, livraisons, communication, design des bouteilles : rien ne lui échappe. « Il faut être un vrai couteau suisse », s’amuse-t-il. Parmi les tâches les plus laborieuses, l’étiquetage manuel des bouteilles se démarque. « C’est fastidieux, mais gratifiant », admet-il. Sa passion le pousse à perfectionner sans cesse ses techniques.

Le gin, un art de vivre et d’expérimentation

À l’Officine, l’innovation est reine. Baptiste ne se contente pas de produire des gins classiques. Inspiré par sa belle-mère, adepte de lithothérapie, il expérimente même avec des pierres énergisantes. « C’est fascinant d’explorer l’influence des énergies sur le goût », explique-t-il. Au-delà de la technique, l’artisan reste un artiste dans l’âme, utilisant le gin comme un moyen d’exprimer sa créativité.

Son premier gin, le Gin Phi, illustre cette démarche. Une recette aux notes de citronnelle, de gingembre, de cardamome, et de fleur de génépi, pensée pour séduire le plus grand nombre. « J’ai voulu éduquer les gens avec des arômes simples, mais élégants », précise-t-il. Les saisons rythment ses créations : en hiver, le Sigma Gin offre des notes chaleureuses de mandarine et d’épinette, tandis qu’en été, le Gin Tau rafraîchit avec sa mangue, son kiwi, et ses accents d’hibiscus.

Un laboratoire d’idées en perpétuelle effervescence

L’innovation continue est au cœur de l’Officine. Tous les deux à trois mois, des éditions limitées voient le jour. Baptiste s’amuse avec des saveurs inattendues : chocolat, pop-corn, ou encore des expérimentations plus audacieuses. « J’ai même essayé de distiller de la choucroute, mais ce n’était pas concluant », plaisante-t-il. Certaines idées restent des défis qu’il espère relever un jour.

Parmi ses projets les plus ambitieux, il mentionne des collaborations avec des vignerons alsaciens pour des gins vieillis en barrique, en respectant les principes de la biodynamie. « On joue avec les cycles lunaires pour des arômes encore plus naturels », explique-t-il. Le Psi Gin vieilli en fût illustre cette quête d’authenticité, sublimée par les influences des pierres énergétiques.

Un esprit libre, entre mer et stratosphère

L’exploration ne s’arrête pas aux frontières de son laboratoire. Baptiste a même envoyé du gin dans la stratosphère, rêvant d’infuser l’alcool des particules célestes. Un autre projet a consisté à immerger un gin en mer pendant un an pour capter des nuances marines uniques. Et bientôt, une aventure maritime emmènera un gin autour du monde à bord d’un voilier. « C’est un terrain de jeu sans limites », s’enthousiasme-t-il.

Un savoir-faire artisanal à taille humaine

Dans un monde dominé par l’industrie, Baptiste revendique une production artisanale, locale et raisonnée. « Je ne cherche pas à produire plus, mais à produire mieux », affirme-t-il. Tout commence par le choix minutieux des ingrédients. « Ce matin, j’ai reçu des mandarines Satsuma d’un producteur français », dit-il, mettant en avant l’importance de ses partenariats avec des cultivateurs passionnés.

Deux méthodes de distillation cohabitent dans son atelier : l’alambic à colonne de 50 litres, parfait pour des spiritueux classiques, et un évaporateur rotatif pour une distillation sous vide. « Avec l’évaporateur, on préserve des arômes délicats comme ceux de la fleur de vigne », explique-t-il. Cette dualité technologique lui permet de créer des gins aux profils aromatiques variés.

Des défis constants et une passion intacte

L’expérimentation ne se solde pas toujours par un succès. « J’ai essayé un gin carotte-orange sanguine, mais ça n’a pas donné le résultat escompté », raconte-t-il en riant. Pour lui, chaque échec est une leçon. Se ressourcer dans son jardin, où il cultive des plantes aromatiques, l’aide à retrouver l’inspiration. « C’est ma méditation », confie-t-il.

Un artisanat authentique tourné vers l’avenir

Baptiste Kirchhoffer, avec sa micro-distillerie L’Officine, a su conjuguer tradition et innovation. Entre ses éditions limitées et sa gamme permanente, il ne cesse de repousser les frontières de la distillation artisanale. Loin de toute industrialisation, il conserve une approche respectueuse de la nature et de la qualité.

« Je me concentre sur ce que je maîtrise, mais je reste toujours curieux », conclut-il. Avec une imagination débordante et un respect des valeurs artisanales, Baptiste est prêt à écrire les prochains chapitres de son aventure, où chaque bouteille reste une promesse d’émotion et de découverte.