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Parmi les collines de Turckheim, au pied du massif vosgien, le Domaine Hurst incarne un modèle exigeant d’engagement environnemental dans la viticulture alsacienne. À sa tête, Samuel Tottoli défend avec passion une viticulture biodynamique, bien au-delà d’un simple effet de mode.

Un héritage transformé par la conviction

Créé en 1926, le Domaine Hurst a connu un tournant décisif en 2016 lorsque Samuel Tottoli, en partenariat avec Marc Rinaldi, entrepreneur colmarien, en a repris les rênes. « Nous avons tout de suite converti les 12 hectares en biodynamie« , explique-t-il. Le domaine est aujourd’hui doublement certifié Demeter et Biodyvin (deux des plus exigeants labels de la viticulture respectueuse de l’environnement).
La motivation ? « Une évidence« , selon Tottoli, qui pratiquait déjà la biodynamie depuis le début des années 2000. Pour lui, cette approche est particulièrement adaptée aux terroirs granitiques, des sols fragiles, sensibles aux dérèglements climatiques.

Au-delà du bio, pourquoi la biodynamie ?

« La bio, c’est un premier pas. Mais pour exprimer la vraie nature de nos terroirs, ce n’était pas suffisant« , tranche le vigneron. Car la biodynamie, contrairement au simple label bio, pousse la logique plus loin : elle stimule la vie des sols, renforce naturellement la plante, favorise un enracinement plus profond, et donc une meilleure résistance aux sécheresses.
Samuel Tottoli insiste sur les préparations biodynamiques (compost Maria Thun, tisanes, silice (500, 501)) et les pratiques lunaires, non comme un dogme ésotérique, mais comme une tradition paysanne retrouvée. « On n’a rien inventé. On revient aux bases de l’agriculture, à ce que faisaient nos grands-parents.« 

L’impact se mesure à plusieurs niveaux. « On observe une biodiversité accrue, une présence mycorhizienne (champignons symbiotiques) renforcée, des sols plus aérés, plus profonds. » Le résultat se retrouve dans le verre : des vins plus digestes, salins, équilibrés, qui expriment mieux la minéralité du granite.
Quant à la quantification scientifique, elle reste complexe. « Ce n’est pas toujours mesurable, mais c’est sensible. Et surtout, c’est constant. On voit l’évolution, tant au vignoble qu’en cave.« 

Un coût, mais une vraie valorisation

Oui, la biodynamie est plus coûteuse (entre 30 et 40 % de plus que le conventionnel) en raison du travail manuel, des préparations, et de la vigilance quotidienne. Mais elle permet aussi une valorisation supérieure du produit. « Le consommateur est prêt à payer pour un vin qui a du sens« , affirme Samuel Tottoli.
La demande est d’ailleurs en forte croissance, en France comme à l’étranger. « Les marchés scandinaves, américains, canadiens raffolent des vins en biodynamie. » Et l’Alsace, forte de ses terroirs, a une carte à jouer : c’est la région la plus bio d’Europe.

Face à la multiplication des labels, la confusion guette, « il faut différencier ce qui est un mode cultural (bio, biodynamie) d’une méthode de vinification (nature, macération)« , explique Samuel Tottoli. Lui revendique clairement ses vins de macération en « Vin de France » et non en « AOC Alsace« , faute d’un cadre réglementaire adapté.
Il regrette aussi un déficit de communication : « On n’a pas assez dit que l’Alsace est pionnière en bio et biodynamie. C’est un tort. Il faut plus de clarté, plus de pédagogie.« 

Un acte de foi, mais surtout de respect

Pour Samuel Tottoli, faire du vin en biodynamie, « ce n’est pas juste une technique, c’est une philosophie. » Cela implique un respect accru de la plante, du sol, de l’environnement, mais aussi de l’humain : « On apprend tous les jours. On est plus ouverts, plus attentifs. »
Et contrairement à certaines idées reçues, les vins biodynamiques ont une excellente garde. « Ils vieillissent même mieux, parce qu’ils sont plus denses, plus profonds, plus équilibrés.« 

Face aux aléas climatiques, la biodynamie offre des solutions. « Avec des racines plus profondes, les vignes résistent mieux à la sécheresse« , dit Samuel Tottoli. En revanche, les années humides comme 2021 ou 2024 restent difficiles, même pour les meilleurs.
L’avenir ? Pas d’agroforesterie pour l’instant, mais une volonté affirmée : continuer à creuser le sillon d’une viticulture durable, sincère, enracinée dans son terroir.

Le Domaine Hurst, par la voix passionnée de Samuel Tottoli, incarne cette nouvelle génération de vignerons alsaciens où les labels ne sont pas des arguments marketing, mais les marqueurs visibles d’une viticulture de bon sens, engagée et respectueuse.